mercredi 21 juillet 2010

VACANCES EN STRIP TRIPS A LA PLAGE


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on s'Trip en bateau pour arriver sur l'île à mille lieues de tous lieux
on arrive en même temps que les pêcheurs, leurs grandes barques remplies de crustacés aux formes inédites
la mer descend doucement et les bateaux s'échouent mollement sur le sable
les pêcheurs partagent leur pêche sur la plage, on la cuit dans le sable, au soleil couchant

matin, la plage est vide. On s'Trip solo, surfe la première vague avant le café
bientôt le monde sera là, il faudra se cacher, s'aimer comme en secret, comme avant
laisser les familles entre elles, les amis entre eux, les enfants tout autour
retrouver la natte, sous le toit de feuilles, le sable sécher sur la peau

quand l'ombre revient, on s'Trip sur les rochers, pieds nus, la couture du short entrave l'escalade
il fait frais, presque, mais le soleil encore haut nous promet encore quelques heures
on s'écorche, on s'essouffle, on rit. La mer remonte, l'écume vient rafraîchir nos pieds endoloris
on accueille le sable chaud comme une vieille paire de converse

on s'Trip dans les bars le long des plages, le long du port, le long des rochers
on goûte des mélanges colorés, sucrés, acides, longs, courts, toujours frais
les étoiles naissent dans nos têtes avant d'apparaître dans le ciel
puis la magie est partout, sur la plage, la nuit au dessus, la nuit au dessous.


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Musique :
  • The Church - Under The Milky Way

Dessins :
  1. Acapulco
  2. Pays-Bas
  3. Madhia
  4. Acapulco


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dimanche 11 juillet 2010

SOIXANTEHUIT


INTERLUDE
Pendant ce temps à Cancùn : Ruben Isaac Albarran Ortega, chanteur et guitariste du groupe Cafe Tacvba (s'il vous plaît, prononcez Café Tacouba) est plongé dans un abîme de perplexité quand il voit une bande annonce pour le bulletin météo de sa région diffusée au son de "Ojala que llueva cafe". Il se dit probablement qu'il n'aurait jamais dû écrire une chanson aussi populaire. 
Au même instant, dans une ruelle d'Antibes, les pavés luisent de la pluie qui les a martelés toute la semaine précédente sans discontinuer. La chaleur orageuse qui plombe encore l'atmosphère fait remonter l'humidité en une brume bretonne. Les habitants restent terrés chez eux, les bateaux restent au port. La ville retient son souffle. Au loin des pas résonnent sur les pavés mouillés. Peut être cette accalmie signe la fin de la première saison des pluies de la côte d'Azur?
C'est tout l'inverse que vit une autre ruelle, à des milliers de kilomètres de là. Tout l'inverse et pas tant que ça finalement :  car le froid polaire qui saisit la ville de San Francisco en ce mois d'août n'a pas plus lieu d'exister que la mousson à Antibes. Les branches des arbres gèlent, les pelouses des parcs sont dures comme de l'asphalte, les oiseaux ne chantent plus. Le temps semble tourner à l'envers. Chaque matin, les habitants de la ville s'apprêtent à voir une aurore boréale. Ils le souhaiteraient presque, histoire de tirer un avantage de cette situation morbide.
Et dans toutes les rues du monde, à ce même instant, la même question habille toutes les lèvres : "qu'est ce qui est en train d'arriver?" Et aucune réponse ne vient. Les chercheurs cherchent, les militaires s'entrainent, les gouvernements s'organisent. Chacun un peu plus qu'à son habitude, chacun avec la même attitude un peu vaine.

Le seul qui semble savoir, le seul qui semble ne pas s'inquiéter, le seul qui a compris qu'il était trop tard pour avoir peur : c'est Gabriel Pinsec. L'infernal, le démoniaque, le méphistophélique Dr VonSchrecklich aurait-il gagné?

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Musiques :
  1. Café Tacuba - Ojalà Que Llueva Café
  2. Stan Ridgway - Walking Home Alone
  3. Placebo - Pure Morning (Les Rythmes Digitales Mix)
  4. Swell - Is That Important
Dessins :
  1. Tunis
  2. Tunis
  3. Tunis
  4. Tunis


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samedi 10 juillet 2010

SOIXANTESEPT

Après être tombée entre les mains des sbires de l'inqualifiable Dr VonSchrecklich, Charlette Pinsec est trainée devant le savant qui ne la reconnaît visiblement pas et la fait jeter dans un cachot à l'ancienne : de la paille sur le sol et une lourde porte en bois que le garde ferme à l'aide d'une clé plus grosse que son avant-bras. Gabriel Pinsec lui, marque le coup puis décide de voir là la chance qui manquait à leur opération depuis le début : une aide de l'intérieur. Il connait suffisamment Charlette pour savoir qu'elle fera son possible pour voir cette même opportunité et la saisir.
Gabriel Pinsec décide donc de patienter. Il retourne vers la grande cité pour reprendre contact avec la population qu'il a organisée en milice en vue de prendre la forteresse d'assaut. Les opérations seront différées sine die : Il attend un signal. Il se rend aux abords du repaire de l'indigne VonS tous les jours pour en faire le tour, cherchant le moindre signe que Charlette aurait pu lui faire parvenir. Il le sait, il la connait, ce signe viendra. Et alors, il saura quoi faire et comment le faire. Comment stopper une fois pour toutes les agissements de ce méprisable individu.
Il peut voir les cobayes continuer d'évoluer comme au premier jour, véritables Adam et Eve de l'aube des temps, sans aucune notion de ce que la vie résere alentour comme cauchemars à venir. Gabriel peut également souvent observer VonSchrecklich lui même qui visite ses cobayes ou donne des instructions à son armée. Mais Gabriel rentre tous les soirs dans sa chambre d'hôtel. Il fait en sorte de dormir suffisamment, de bien se nourrir... Il connait la valeur de ces armes sur un champ de bataille et il sait que, le signal arrivant, il devra se tenir prêt.
Et comme d'habitude avec Charlette, le signal vient de là où il ne l'attend pas. Il déambule dans les rues de la ville quand il s'arrête près d'un parc. Des enfants jouent et l'un d'eux courre vers lui, lui glisse un mot dans la main et repart taper dans la balle avec ses amis. Gabriel déplie le morceau de papier qui dit "rentrez chez vous Gabriel ou je lui fait subir le sort que je lui réservait" (i.e. la transformer en statue, ce qu'il avait l'intention de faire quand les frères Pinsec l'avaient sauvée - voir le pharamineux épisode SIX de ces mêmes auteurs en herbe). Gabriel sent la vie s'échapper de ses doigts à travers le morceau de papier... Tout est perdu. L'épouvantable VonSchrecklich a reconnu Charlette....

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Musique :
  • Mazzy Star - Into Dust (Live)

Dessins :
  1. Tunis
  2. Tunis
  3. Tunis
  4. Tunis


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vendredi 9 juillet 2010

SOIXANTESIX


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Restons un moment avec les Pinsec pour voir comment ils vont réagir. Loin de s'apitoyer, ils sont retournés à la grande ville pour recruter une sorte de milice. Cela n'a pas été bien difficile, il a suffit de montrer à chaque homme une photo de la jeune femme disparue, nue, enceinte et accompagnée d'un ersatz d'homoncule pour lui faire prendre les armes. Très vite, la ville est en ébullition. On s'échange des tenues de combats, des armes de poing, des fusils. Très vite, la liesse gagne les foules qui finissent par se rassembler sur la grande place ouverte au soleil qui cible la ville en son centre. Les esprits sont violents, la haine est palpable... 
Gabriel Pinsec parvient néanmoins à contenir l'énergie destructrice et à calmer suffisamment la foule pour exposer l'embryon de plan que Charlette et lui ont mis au point et qui nécessite la mobilisation de chacun. Rapidement, la foule se disperse et chacun rentre s'enfermer chez lui. Les Pinsec retournent à leur riad près de la forteresse du repoussant VonSchrecklich et reprennent leurs tours d'observation. Pendant que Charlette se repose, Gabriel fait une dizaine de fois le tour de l'enceinte, répertoriant encore et encore les heures de passages des gardes et les entrées ou les lézardes dans le mur qui permettraient un assaut rapide et surprise.
Charlette vient prendre le relais et Gabriel part se coucher mais le sommeil ne vient pas. La chaleur, l'excitation, la peur aussi, trop d'émotions contradictoires qui le bousculent et le gardent éveillé. Il passe donc le temps du tour de garde de Charlette à tourner en rond dans sa chambre, à fumer, à imaginer toutes les possibilités, échafauder plans sur plans, cherchant les meilleures stratégies d'attaque, faisant, défaisant, refaisant... Son paquet de blondes américaines fini, il ne tient plus. Il sort et part rejoindre Charlette au point de rendez vous, se disant qu'il la rattrapera sur le parcours fixé.
Arrivé aux abords du mur d'enceinte de la forteresse du fastidieux Dr VonSchrecklich, il s'engage sur le parcours de surveillance, vide de toute appréhension. Mais au fur et à mesure qu'il avance, prenant garde de ne pas se faire repérer, la peur le gagne : nulle trace de Charlette. Il finit bientôt le tour de l'enceinte et rien, pas le moindre signe. Il s'arrête devant le dernier point d'observation, une meurtrière d'où il peut observer l'intérieur de la forteresse, il monte jusqu'au piton rocheux pour regarder de l'autre côté et là, son sang se fige. Elle est là, elle se débat, aux prises avec trois gardes armés jusqu'aux dents, ils l'ont prise...

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Musique :
  • Daniel Darc - Psaume XXIII

Dessins :
  1. Tunis
  2. Tunis
  3. Tunis
  4. Tunis


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jeudi 8 juillet 2010

SOIXANTECINQ


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En attendant de retrouver VonSchrecklich, retrouvons les Pinsec aux prises avec les autorités locales. Devant l'ampleur des moyens dont dispose l'insupportable savant, Gabriel et Charlette ont en effet décidé de présenter le dossier à charge qu'ils ont monté contre lui aux responsables de la police de la ville voisine. Ils ont bien sûr essuyé de nombreux refus et délais avant d'avoir enfin un rendez vous avec quelqu'un ayant suffisamment d'autorité pour pouvoir espérer déclencher une opération de représailles d'une quelconque envergure.
Malheureusement, le jour de ce rendez vous arrivant, il s'avère qu'il coïncide avec le jour des visites mensuel que le préfet local accorde à ses concitoyens. Et voilà les Pinsec noyés dans la masse électorale. Ils choisissent de ne pas relever l'insulte qui leur a été faite et de patienter jusqu'à leur tour pour enfin exposer les menaces que l'incoercible VonSchrecklich fait peser sur la région, le pays, le monde entier. Et ils attendent donc derrière des vieilles dames qui viennent râler sur le prix du pain ou les passages fréquents de troupeaux et de bergers dans les rues de leurs villages et au milieu de voisins qui se chamaillent l'eau d'un même puits...
Les Pinsec récapitulent pour eux-mêmes les pièces à charge de leur dossier sur l'immarcescible Dr VonS., des crimes de guerre qui lui sont imputés et qui relèvent du tribunal pénal international aux crimes personnels qui les touchent plus particulièrement - rappelons que l'inaltérable Dr Vonschrecklich avait tenté de transformer Charlette Pinsec en statue vivante pour le compte du Prince Zaminhoff, une péripétie brillamment narrée dans le génial numéro SIX de nos deux jeunes et formidables auteurs. Et enfin le dernier véritable crime dont aient pu être témoins les Pinsec : l'enlèvement puis la séquestration d'une jeune fille plus belle que le jour dans la ville voisine. Un forfait qui remontait déjà à une dizaine de mois.
Lorsque les Pinsec sont enfin reçus par le préfet et son aréopage, il est déjà tard et la lumière du jour a fondu comme neige au soleil. Les pièces du dossier qu'ils présentent, plein d'enthousiasme et d'envie d'en découdre enfin avec l'inénarrable Dr VonS, deviennent difficiles à distinguer dans la pénombre qui a envahi les bureau de la maréchaussée indigène. Tant et si bien qu'aucun des membres de ce grand conseil ne distingue véritablement les traits de la jeune fille en question - qui a part ailleurs l'air d'être libre comme l'air sur les photos rapportées par les Pinsec - ni ceux de ce soi-disant Dr VonSchrecklich qui n'apparaît sur aucun des avis de recherche internationaux dont ils ont connaissance. Aïe! Chou blanc pour les Pinsec!


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Musique :
  • Leonard Cohen - Everybody Knows

Dessins :
  1. Tunis 
  2. Tunis
  3. Tunis
  4. Tunis


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mercredi 7 juillet 2010

SOIXANTEQUATRE


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A ce point de l'histoire il est temps d'observer celui que VonSchrecklich devrait craindre plus que tout : Gabriel Pinsec. A nos nouveaux lecteurs, il faut rappeler que les frères Pinsec avaient mis en fuite le Dr VonS. après avoir déjoué les plans du Prince Zaminhoff, une épreuve qui avait donné à Gabriel Pinsec l'occasion de se débarrasser de son frère et de convoler avec l'actrice Charlette : une aventure relatée dans l'excellent SIX chez le même éditeur. Le dernier des Pinsec et son épouse n'avaient jamais quitté le Dr VonS. des yeux et leur filature les avait menés à la porte du repaire où l'infâme doktor préparait son ultime forfait.
Le couple Pinsec avait donc, sous la couverture de l'anonymat touristique, élu domicile dans un riad sis dans le village le plus proche de la forteresse de VonSchrecklich. Parce que l'ignoble VonS. était bel et bien retranché dans une forteresse inexpugnable, du moins selon les moyens des Pinsec qui, n'étant que deux, ne pouvaient rêver de rivaliser avec les capacités offensives de l'armée des Etats Unis d'Amérique, ni même de l'armée du Lichtenstein. Pister le savant nazi jusque là leur avait déjà demandé des moyens et un temps considérables.
Ils étaient maintenant réduit à observer de loin l'agitation qui régnait dans la dite forteresse, noter les allées et venues, répertorier ce qui pouvait l'être, identifier chacune des personnes qui travaillaient là, en suivre certaines dans leurs trajets jusqu'à la ville pour diverses courses. Contrairement à nous, les Pinsec n'avaient aucune idée de ce que tramait l'abominable Dr VonSchrecklich. Ils avaient cependant noté cet incroyable, autant qu'incertain, couple qui semblait jouir d'une liberté absolue dans la forteresse. Mieux, tous les gardes de l'innommable VonS. donnaient l'impression d'être autant sous leurs ordres à eux que sous ceux du savant.
Les deux jeunes gens, formidablement mal assortis - elle était belle comme un soleil couchant, il était banal jusqu'à l'exubérance - allaient et venaient à leur guise sans jamais sortir de l'enceinte. Ils avaient une large propension à l'acte sexuel, se déshabillant en dépit du nombre de regards posés sur eux mais s'enfermant toujours pour passer à l'acte - les efforts qu'ils mettaient tous deux à se faire entendre démentant toute velléité de pudeur. Les Pinsec avaient également pu observer que la jeune femme était enceinte et qu'elle correspondait au signalement d'une autre jeune femme, portée disparue dans la ville où ils avaient précédemment filé le turpide VonS.

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Musique :
  • Giorgio Moroder - Chase (Theme from Midnight Express by Alan Parker)

Dessins :
  1. Sud
  2. Sud
  3. Sud
  4. Tunis


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mardi 6 juillet 2010

SOIXANTETROIS


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Depuis le début de l'expérience avec Alpha et Sigma, pratiquement six mois se sont écoulés. Sigma est maintenant enceinte de 4 mois et tout est en ordre. VonSchrecklich a déménagé son laboratoire, ses assistants et ses cobayes loin de la ville où il avait commencé ses travaux. Non pas que sa présence ait pu paraître suspecte mais parce que ses cobayes allaient devoir sortir un peu et qu'il était impossible de laisser Sigma faire un pas dehors, dans la ville même où elle avait été enlevée. Une ville où tous les hommes étaient à sa recherche.
Ici ils disposent d'un vaste terrain arboré, au bord de la Méditerrannée. Ils peuvent profiter de plusieurs grottes creusées dans les rochers, pour se mettre à l'écart - curieusement ils ont conservé ce goût pour la pudeur, même après avoir passé tant de semaines sans se cacher de Nourri, de son assistante, ni de lui même. Ils poursuivent leur idylle commencée dans l'immeuble où ils se sont rencontrés - du moins est-ce là ce dont ils se souviennent - et pour eux, tout est toujours parfaitement au-delà du bonheur absolu, à tel point qu'ils ne pensent plus jamais à la mort.
VonSchrecklich est prêt à recevoir le fruit de toutes ces années de recherches, ces années passées à organiser les événements, à rassembler le matériel, à former son personnel, à recruter les cobayes. Il en bave parfois, seul le soir. Il ne dort plus depuis plusieurs mois, incapable de mettre son esprit au repos. Tout juste quelques minutes par ci, par là, pour récupérer de quoi tenir. Il n'a plus d'autre objet en tête que le résultat de son expérience : le fruit des entrailles de Sigma. Si tout se déroule comme il l'a prévu - et tout se déroulera comme il l'a prévu - il devrait pouvoir effectuer un retour fracassant sur le devant de la scène.
Ne nous leurrons pas, le Dr VonSchrecklich a une idée en tête et il y a de fortes chances qu'elle implique de fortes sommes d'argent, un odieux chantage à la planète, la destruction de l'univers, partielle ou définitive, l'anéantissement de la race humaine, tout cela séparé ou combiné, à brève ou longue échéance. Il apparaît tout à fait impossible, au vu de la manière dont ses expériences ont été menées, que VonSchrecklich soit devenu un bienfaiteur de l'humanité...

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Musique :
  • Iron And Wine - Love Vigilantes (New Order cover)

Dessins :
  1. Sud
  2. Sud
  3. Mahdia
  4. Sud


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lundi 5 juillet 2010

SOIXANTEDEUX


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Jusqu'ici, tout s'était déroulé exactement tel qu'il l'avait prévu. VonSchrecklich n'était plus homme à se laisser surprendre. Le but qu'il poursuivait, depuis le tout début de l'ère nazie, l'avait suffisamment mis à l'épreuve. Le monde serait toujours contre lui, il lui fallait donc avoir toujours plusieurs coups d'avance sur les éventuels bâtons qu'on était susceptible de glisser dans ses roues. Il avait donc soigneusement effacé ses traces après avoir blanchi son nom auprès de la CIA. Installé depuis dix ans en Afrique du Nord, il avait patiemment mis en place les bases d'une organisation qui allait, enfin, lui permettre de donner "corps" à son projet. 
La clé du succès reposait sur la discrétion absolue de son travail. Il avait ainsi limité son entourage au strict nécessaire : un assistant d'une force sans commune mesure - sur qui il avait testé en premier son système de contrôle de la pensée - et une jeune femme qui le suivait depuis son arrivée en Afrique et qui parfois croyait encore plus que lui même dans la portée de son projet. Sa fougue et son ardeur au travail le ravissaient et il se félicitait d'avoir, pour la première fois depuis la fin de la guerre, enfin trouvé quelqu'un en qui il pouvait avoir une pleine et entière confiance.
Ainsi isolé, il avait pu travailler sans relâche à améliorer ses formules, en les testant sur son assistant qui, rendu docile, semblait pouvoir en supporter encore davantage. Une fois au point, il chercha longtemps les cobayes idéaux et c'est l'homme qu'il trouva en premier. Son assistante entreprit de le séduire et ils purent lui tendre un piège. Une fois sous son emprise, il avait pu améliorer au maximum les capacités de son cobaye mâle. Il semblait supporter les évolutions que son corps subissait et même, cela renforçait le contrôle que VonSchrecklich avait sur son esprit. Il ne lui restait ensuite qu'à trouver son cobaye femelle, ce qui serait la première mission de ce cobaye mâle, baptisé Alpha.
Pas particulièrement séduisant, Alpha avait été choisit pour ses capacités physiques - loin d'atteindre les formidables sommets dont Nourri, son assistant était capable - et intellectuelles. La taille de son cerveau indiquait à VonS. qu'il parviendrait sans problème à en augmenter les pouvoirs. Aujourd'hui Alpha communiquait par ondes télépathiques, maitrisait la physique nucléaire et était ainsi en mesure de l'aider dans une grande partie de ses recherches, sans même s'en rendre compte. Il était également capable de susciter chez un être du sexe opposé le désir le plus ardent. C'est ainsi que Sigma avait été recrutée après avoir été sélectionnée. Et c'est ainsi qu'elle avait été, elle aussi, améliorée...

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Musique :
  • Pulp - Master Of The Universe

Dessins :
  1. Mahdia
  2. Mahdia
  3. Mahdia
  4. Mahdia


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dimanche 4 juillet 2010

SOIXANTEETUN


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Quelques semaines plus tard... Aussi loin qu'ils pouvaient s'en souvenir, leur amour avait l'évidence de la rencontre d'Adam et Eve. Il leur semblait qu'ils avaient toujours vécu ici, dans ces quelques pièces et ce grand jardin clos ; avec ce drôle de serviteur muet qui mesurait près de deux mètres en hauteur comme en largeur, qui était affublé d'une bosse sur l'épaule droite et d'une jambe plus courte que l'autre, terminée par un morceau de bois mal taillé et dont les gestes, d'une douceur incomparable, lui conféraient la grâce d'une danseuse de ballet.   
Leurs journées étaient entièrement dévouées à la luxure. Et aussi loin qu'ils s'en souviennent, ils n'avaient jamais eu d'autre activité ni d'autre goût. Ils parlaient peu, généralement dans le simple dessein de mieux guider leur plaisir, ou sinon pour en partager les sensations. Leur serviteur les visitait, cinq ou six fois par jour, pour leur porter un repas léger et frais fait de fruits et de boissons discrètement sucrées et enivrantes ou pour les conduire au bain où généralement ils se livraient à la même activité que dans les autres pièces ou dans le jardin.
Le temps, dans ces conditions, s'écoulait comme l'eau dans le grand bassin où ils se baignaient : sur un rythme immuable et accompagné d'un son frais et cristallin. Jamais ils n'eurent la moindre sensation du nombre d'heures, de jours, de semaines, de mois ou d'années qui avaient pu s'écouler depuis le premier instant et, si l'éternité n'avait pas de sens pour eux, ils en expérimentaient un peu plus chaque jour les vertus que tout physicien aurait aimé théoriser. Et ce bonheur était tel que ni lui, ni elle, ne céda à la tentation d'ouvrir une porte qui leur avait été défendue depuis toujours, même s'ils ignoraient qui le leur avait défendu.
Pendant les quelques semaines qui séparent la capture de la jeune fille de ce moment où nous les retrouvons, l'infâme Dr VonSchrecklich fuma avec impatience dans son bureau. Son assistante lui rendait visite cinq ou six fois par jour pour lui faire compte rendu des activités des deux jeunes gens. Tableaux et graphiques s'accumulaient, aux murs et en tas sur son bureau, prévoyant un final que VonSchrecklich attendait comme un volcan attend d'entrer en éruption. Quel odieux tour le savant nazi avait il encore manipulé?


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Musique :
  • George Delerue - Thème de Camille (Theme from Le Mépris by Jean-Luc Godard)

Dessins :
  1. Mahdia
  2. Mahdia
  3. Mahdia
  4. Mahdia


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samedi 3 juillet 2010

SOIXANTE


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IL ETAIT UNE FOIS... une jeune fille belle comme une nuit de pleine lune. Elle passait ses journées à se promener dans les rues de la ville, les allées des jardins. Les hommes la suivaient, parfois simplement du regard, parfois discrètement, parfois ouvertement. Mais à chacun, elle se dérobait. Un jour, alors que sa présence noire et lumineuse irradiait le grand jardin qui rafraîchissait le centre de la ville, elle entreprit de suivre un jeune homme qu'elle n'avait jamais vu auparavant et qui semblait ne pas l'avoir simplement remarquée.
Le jeune homme avait un regard étrange, comme perdu dans un songe que nul à part lui ne pouvait voir. Il marchait, les bras le long du corps, dans un costume sombre qui semblait trop grand pour lui et trop chaud pour le climat de la ville. Elle le suivit à distance, alors qu'il empruntait les rues de la ville qui mènent vers les faubourgs. Il marchait assez lentement ce qui l'obligeait elle à de fréquents arrêts, en embuscade, puis à courir derrière lui pour le rattraper. Elle courait pieds nus et ses pas résonnaient sur le pavé des ruelles comme les coussinets d'un chat sur le carrelage d'une cuisine.
Il finit par s'arrêter devant un petit immeuble. Il longea le passage qui courait le long du pignon et menait à un escalier descendant vers une porte. Une fois en bas des marches, il entra dans la cave. Elle descendit les marches, hésitante. Elle sentait la poussière sous ses pieds et essayait de placer ses pas dans ceux de l'homme. Elle poussa la porte qui était restée entrouverte et avança dans un couloir sombre au bout duquel une autre porte entrouverte laissait filtrer de la lumière. Elle franchit la porte, une main se plaqua sur son visage et elle perdit connaissance.
Quand elle ouvrit les yeux, elle était allongée sur une grande table, ligotée aux chevilles et aux poignets. Le jeune homme qu'elle avait suivi se tenait assis sur une chaise, droit, et l'air hagard. Elle entendait un clapotis, des gouttes qui s'écoulaient d'un robinet et tombaient dans l'eau. Ses yeux recouvraient peu à peu de leur acuité. Au bout d'un temps, une porte s'ouvrit et un homme entra. Il était vieux, voûté, marchait avec une canne. Les quelques cheveux qui lui restaient autour du crâne étaient d'une blancheur de craie et il portait un monocle à l'oeil gauche et son autre oeil était manquant : -"Bonjour Fräulein. Je suis le Dr VonSchrecklich. N'ayez aucune crainte."

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Musique :
  • Pulp - Fairground

Dessins :
  1. Mahdia
  2. Mahdia
  3. Mahdia
  4. Mahdia


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vendredi 2 juillet 2010

CINQUANTENEUF


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Je me souviens d'un jour où j'avais un gros bouton exactement au milieu du nez, un très gros bouton d'acné. Il était placé là au bout de mon nez - que j'ai toujours trouvé passablement proéminent, même s'il ne m'a jamais précédé nulle part, mes pieds format palmipède s'en chargeant fort bien - comme un radar au bout du nez de l'avion de chasse. Je me souviens que ce jour là, il y avait une soirée, acnéique. Je me souviens que j'ai longtemps hésité avant de finalement me décider à m'y rendre, chargé de toute l'appréhension relative à ce gros, très gros, bouton.
Je me souviens qu'une fois sur place, je rencontre sur le pas de la porte celui qui était le meilleur d'entre mes amis. Je m'entends encore lui faire part de ma vive appréhension, relative à ce gros, très gros bouton qu'il n'avait pas manqué de détailler du regard et du doigt. Je me souviens de la folle confiance que je plaçais dans ce meilleur d'entre mes amis. Je m'entends encore lui parler de ce gros, très gros bouton sur le ton de la confidence la plus pure et lui de me répondre avec le sens de l'humour que l'on n'accepte que de ses meilleurs amis, dans le seul dessein de me rassurer.
Je nous revois, pénétrant dans l'immense hôtel particulier où la fête se déroulait, marchant en riant le long des couloirs vides, entendant les cris joyeux et la musique, étouffés, venant des pièces attenantes, à la recherche du reste de nos meilleurs amis. Je les vois ces meilleurs amis, attablés dehors dans le jardin, entourés d'inconnus et d'inconnues surtout, affriolantes pour ma libido extatique. Et j'entends encore, comme le seul survivant du cataclysme d'Hiroshima, ce meilleur d'entre mes meilleurs amis dire : "faites pas attention, il a un gros bouton sur le nez".
Aujourd'hui mon avenir est advenu, mais il ne ressemble pas à celui dont je rêvais avant cet épisode particulier. Je me voyais pilote de chasse, je vends des cartes postales.

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Musique :
  • Bourvil - C'Etait Bien (Le Petit Bal Perdu) - (Vidéo chorégraphiée par Philippe Découflé)

Dessins :
  1. Mahdia
  2. Mahdia
  3. Mahdia
  4. Mahdia


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jeudi 1 juillet 2010

CINQUANTEHUIT


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Ça fait un an que je n'ai pas tenu un crayon. Dans mon métier c'est comme une petite mort, une mise à la retraite anticipée au mieux. Au début j'ai vraiment eu envie d'arrêter de dessiner, de prendre des vacances avec mon travail. Quand on fait quelque chose d'abord pour son propre plaisir et que ce plaisir devient un travail, au bout de quelques années le plaisir se perd peut être. Alors après un trop plein de dessins, j'ai décidé de prendre des vacances. J'ai fermé la maison et je suis parti. Je n'ai pas emporté de crayons...
J'ai traversé quelques pays. Je me suis arrêté dans certains, j'en ai survolé d'autres. J'ai fini par racheter de quoi dessiner. Quelques craies de fusain, quelques pinceaux, de l'encre et du papier. J'espérais que toucher le matériel après quelques mois d'abstinence me donnerait envie. Ça plus les paysages qui défilaient sous mes yeux, vierges de mon regard, de mon trait. J'ai essayé. Mais rien ne venait. Ma main était comme morte, comme si le contact du crayon entre les doigts, du grain du papier à aquarelle sous la paume m'étaient étranger.
J'ai laissé tomber mes crayons une fois de plus. J'ai marché. J'ai visité des villes, des villages, des campagnes inconnues. J'ai rencontré des hommes des femmes, des enfants. J'ai échangé beaucoup. Mais je n'ai pas fait un dessin, pas un seul. J'ai décidé que mes vacances étaient finies et je suis rentré. Ma maison vide, ma table à dessin vide, le courrier qui s'entassait sur la table du séjour. Rien ne m'inspirait dans ce que je voyais. Je suis sorti, faire le tour du quartier, marcher dans ces rues familières que j'avais passé quelques mois à oublier.
Et j'ai fini par me souvenir comment on tient son crayon...

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Musique :
  • Kate Bush - Running Up That Hill

Dessins :
  1. Mahdia
  2. Mahdia
  3. Mahdia
  4. Mahdia


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