Cela fait trois heures que j'attends. Le train est arrivé en gare ce matin et on m'a dit qu'à partir de 14H ça serait bon et il est presque 17H. Je n'ai pas quitté mon poste depuis que je suis arrivé. Au début quand on attend on est patient. On prend un magazine, un livre, on passe un coup de fil. Mais je n'ai pas de téléphone portable et comme je ne pensais pas devoir attendre, je n'ai pas emmené de lecture. Alors j'ai d'abord attendu normalement, sans inquiétude. Une pause déjeuner peut s'éterniser un peu, on peut être retardé. Mais là, ça fait trois heures. De peur de rater le préposé, je n'ai pas quitté ma place. Et personne qui passe pour me renseigner.
Cela fait trois heures que je contemple, seul, un guichet vide. Certains s'étonnent que je puisse faire preuve d'une telle patience parfois jusqu'à l'absurde. Je me souviens très bien de la première fois que cette patience m'a joué un tour. J'étais lycéen, en classe de première et je passais l'épreuve orale du bac de français. L'épreuve avait lieu dans un autre lycée que le mien et je ne le connaissais pas. Je me suis rendu vers la salle où avait lieu l'examen. Quelqu'un, une jeune fille, attendait déjà dans le couloir. Je me suis assis à côté d'elle et j'ai attendu aussi. Nous avons attendu tous les deux pendant trois heures qu'un homme chargé de l'entretien des locaux nous dise qu'il fallait partir, que les examens étaient terminés, que le lycée était fermé. On s'était trompé de salle.
Il est maintenant 18H et je les vois arriver. Ils me l'amènent sur ces chariots de transport qu'ils ont dans les gares depuis toujours semble-t-il. Un train de chariots tout rouillés qui brinqueballent sur le goudron du quai, se cognent aux vieilles portes battantes de la salle d'attente et qu'ils amènent devant moi. Elle est bien là. Une grande caisse de la taille de deux cercueils. L'un des agents se glisse derrière le guichet et m'appelle.
-Vous êtes Mr Baltran?
-C'est moi.
-Signez ici s'il vous plaît. Vous serez heureux d'apprendre que le voyage s'est déroulé sans problème. Avec toutes nos excuses pour vous avoir fait attendre toute une après midi mais nous avons du effectuer de nombreuses vérifications. Ce n'est pas un chargement habituel que vous avez là.
- Je comprends. Merci beaucoup. Bonsoir.
Et je pars avec la caisse, sur le diable que j'ai emmené avec moi.
Une fois arrivé à la boutique, je porte la caisse au milieu de la réserve, je prends garde que personne ne nous voit de l'extérieur et j'ouvre la caisse. Il est là. On a réussi. Je déroule les bandelettes qu'ils ont enroulées autour de lui. elles sont pleines de poussière et d'une sorte d'enduit jaunâtre qui colle un peu. Il fallait que ce soit crédible pour passer pour une momie du XIXè siècle avant JC. Et dessous, c'est bien lui. Il est bien en vie mais encore inanimé sous le coup des sédatifs qu'ont lui a administré pour lui faciliter le voyage. J'appelle sa femme. elle me dit qu'elle arrive tout de suite avec ses parents. Elle le croyait mort depuis qu'elle avait fuit la Tchécoslovaquie.
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Dessins
- Nantes
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