mardi 28 mars 2017

DEUXCENTSOIXANTEETONZE

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Les dessins dans la boîte aux lettres aujourd'hui :
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J'ai toujours lu des livres. Qu'est-ce qu'on peut lire d'autre patate, des prospectus ? Des recettes de cuisine à dix centimes sur des feuilles de papier absorbant ? « Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours su lire... », j'ai lu ça dans un livre. Non. « J'ai toujours aimé lire. » Voilà qui est vrai. Romans, bande-dessinées, magazines, science-fiction, fantastique, policier, épouvante, aventures, histoire, géographie, sciences... Tout ce qui se lit, j'ai toujours aimé le lire, sans préférences. Du moins au début.

J'ai toujours aimé lire parce qu'en restant au même endroit, je pouvais grâce à un livre être n'importe où ailleurs. En bas des pyramides d'Égypte avec Napoléon, aux portes des enfers avec Ulysse, près de Proxima du Centaure sur un vaisseau de la Fondation, dans le manoir de Styles avec Hercule Poirot, 20 000 lieues sous les mers avec le capitaine Némo, vous avez compris. Tout ça sans quitter, dans le désordre, mon lit, le canapé du salon, la balançoire, n'importe quel banc du jardin des plantes ou de l'arborétum, la terrasse de n'importe quel café de mon trou paumé. Si je n'ai jamais été un grand voyageur, c'est à cause de tous ces livres que j'ai toujours lus.

Ah oui, il y en a un paquet que j'ai toujours lu, ou que je lis toujours, ou que je suis toujours en train de lire. D'accord, de re-lire. Par exemple, Franny et Zooey, La Guerre et la Paix, Ubik, L'Épopée du Buveur d'Eau, Testament à l'Anglaise, Hors de l'Abri, Les Nouvelles Confessions, la Mémoire dans la Peau, n'importe quel épisode des Six Compagnons. Régulièrement un livre nouveau me tombe des mains. J'en sors dégoûté de la lecture et aucun livre nouveau ne me semble suffisamment séduisant pour prendre à nouveau le risque. Le risque d'être déçu. Alors, je ne peux plus que relire. J'ai toujours été plus fidèle aux amis et aux pays visités dans les livres qu'à tout le reste, à leur musique aussi.
Parce que si j'ai toujours aimé lire, j'ai toujours aimé écouter de la musique. Il y a des livres découverts en même temps que certains artistes, albums, compilations personnelles sur cassette audio... Ne nourrissant aucune intimité préalable, musique et histoire finissaient par se fondre au gré de la lecture et de l'audition communes des deux œuvres. Et ensuite, s'il m'arrive d'entendre une musique sans l'appui des pages du livre, elle me propulse immédiatement dans l'intrigue, les paysages, les personnages de ce livre... Et s'il m'arrive de relire ce livre, la musique qui l'accompagnait se fait entendre immédiatement, sans aucun support haute-fidélité. Proust, les Madeleines, tout ça...
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En musique :
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Dessins :
  1. Becherel
  2. La Chapelle sur Erdre
  3. Nantes
  4. Becherel
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mercredi 22 mars 2017

DEUXCENTSOIXANTEDIX

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Les dessins dans la boîte aux lettres aujourd'hui :
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Enfant, son père l'emmenait partout avec lui. Toutes ses amies étaient jalouse d'elle à cause de lui. Elle, elle était jalouse de toutes ces mamans qu'elle voyait attendre à la sortie de l'école. Longtemps elle s'est demandé d'où elle venait, longtemps elle a imaginé qu'on pouvait ramener une maman à la maison comme on ramenait le pain ou une bouteille de lait. Mais son père n'a jamais ramené de maman à la maison. Il s'occupait de son travail et d'elle, c'est tout. Et il l'emmenait partout. Cinéma, théâtre, expositions, fêtes foraines, des voyages, des châteaux, des parcs, des zoos, le cirque !
Il passait des heures à jouer avec elle, à imaginer pour elle des aventures dans lesquelles elle se coulait sans effort. Il lui préparait la cuisine, lui lisait des histoires, en écrivait pour elle où elle devenait une héroïne, une aventurière, une princesse, un aigle royal, une panthère noire, un dragon ! De toute son enfance elle n'a jamais été seule. Quand elle racontait son père à ses amies, elles en bavaient d'envie ; et elle toujours imaginait en secret ce que cela ferait d'avoir une maman. Son père n'en ramenait toujours pas à la maison. Quand elle a été un peu plus grande, c'est elle qui a demandé un peu d'espace à son père, un peu de solitude.
 

Il fallait qu'elle grandisse un peu à l'écart, pour savoir qui elle voulait devenir disait-elle. C'est à dire qu'elle commençait à imaginer qu'elle allait devenir une maman et elle était passablement en mal d'exemple à suivre. Elle a bien tenté de devenir un garçon, mais d'abord ça ne se fait pas comme ça, à la réflexion, et par ailleurs, elle n'en avait pas envie. La solitude pesant, elle a fini par se mettre à sortir, à trouver que les vrais garçons étaient plus intéressants que celui qu'elle aurait pu devenir. Elle a donc décidé de devenir une maman.

Et ma foi, c'est crevant.

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En musique :
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Dessins :
  1. ?
  2. Nantes
  3. Nantes
  4. Nantes
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samedi 18 mars 2017

DEUXCENTSOIXANTENEUF

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Les dessins dans la boîte aux lettres aujourd'hui :


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  • On tombe sur mon premier quand un imprévu pose problème.
  • On peut prendre de la hauteur avec mon deuxième.
  • On trouve mon tout au bout de la plume du paon, où soi-disant elle le camoufle.

  • Qui use de mon premier combat un reproche.
  • Qui pratique mon deuxième n'a pas peur de l'eau.
  • Qui s'adonne à mon troisième mange un bifteck.
  • Qui visite mon tout voyage en zoographie.

  • S'il est de cocagne, on trouve au sommet de mon premier friandises et cochonnailles.
  • S'il est entendu au pluriel, on dit que la gastronomie fait partie de mon deuxième.
  • S'il est en cuisine, mon troisième est un noble appelé Pyrale de la Farine.
  • S'il est mon tout, vous y faites la cuisine.

  • Le premier chant du jour sort de mon premier.
  • Mon deuxième tient mon premier quand c'est ma première.
  • Quant à mon troisième, comment dire... On est heureux de ne pas le faire, certes, mais au début on apprécie de faire un peu plus que lui et à la fin, on aime faire beaucoup moins...
  • Et mon tout ? Eh bien on les pêche à l'épuisette par exemple.
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En musique :
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Dessins :
  1. Noirmoutier
  2. ?
  3. Noirmoutier
  4. Noirmoutier
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mardi 14 mars 2017

DEUXCENTSOIXANTEHUIT

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Les dessins dans la boîte aux lettres aujourd'hui :

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« ... difficile pour le candidat de la droite parlementaire de faire en ce moment oublier les affaires qui font peser sur sa campagne un poids de plus en plus lourd. Nous apprenons aujourd'hui qu'après les soupçons d'emploi fictif concernant son épouse et deux de ses enfants, de trafic d'influence concernant toujours son épouse et de conflits d'intérêts concernant une société de conseil qu'il a dirigée dans le même temps que sa mandature au parlement, vient s'ajouter aujourd'hui une.... »

« ... l'instant, les autres candidats restent sur une prudente réserve sur ces sujets, surtout la candidate du parti d'extrême-droite, elle-même soupçonnée, directement ou indirectement, dans plusieurs affaires d'abus de bien sociaux, d'emploi fictif, d'escroqueries dans le cadre d'enquête sur le financement de sa campagne en... »

« ... aux Pays-Bas où le candidat d'extrême-droite semble bien parti pour occuper désormais une place prépondérante dans le débat national qu'il devrait rapidement figer, comme l'ont fait ceux qui partagent ses idées et qui siègent déjà dans différentes assemblées de villes, de circonscriptions ou autres...»

« ... et le président des États-Unis a de nouveau... »
« Tu veux pas couper la radio ? Pour une fois qu'il fait beau... »

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En musique :
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Dessins :
  1. Nort Sur Erdre
  2. Nort Sur Erdre
  3. Noirmoutier
  4. Noirmoutier
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dimanche 12 mars 2017

DEUXCENTSOIXANTESEPT

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Les dessins dans la boîte aux lettres aujourd'hui :

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Une fois la maison ouverte, il faut encore aérer toutes les pièces, défaire les bagages, installer les chambres pour les enfants, préparer les chambres pour les autres qui arrivent plus tard, faire le point sur ce qui reste à préparer, les menus, les listes de courses pour les menus, préparer les sacs pour aller faire les courses pour préparer ensuite les repas... Pourquoi faut-il toujours que nous arrivions les premiers ?

« On y va en vélo ? ! » D'accord les enfants... Il faut d'abord les réviser ces vélos qui n'ont pas été utilisés depuis l'été dernier, dont les pneus ne sont pas simplement dégonflés, certains sont crevés, tu t'en occupes ? D'accord, je vais aller faire les course toute seule avec le seul vélo qui fonctionne à peu près correctement, et tu répares les autres en attendant que je sois revenue. Sinon les autres vont arriver, la nuit va tomber et nous n'aurons rien à manger. Pourquoi faut-il toujours que nous arrivions les premiers ?

Évidemment il manque la moitié de ce que j'ai écrit sur la liste. Je ne pouvais pas en prendre plus toute seule et même comme ça, j'ai fait la moitié du chemin à pied. Impossible de remonter la dernière côte. Et finalement le chantier vélo a été abandonné là. « Tu comprend, les autres sont arrivés, les enfants étaient super contents de se retrouver, ils ont voulu aller jouer dans l'eau tout de suite alors on a sorti le bateau et... » Je coupe le son avant la fin de la tirade. Pourquoi faut-il toujours que nous arrivions les premiers ?

Je laisse tout le monde en plan au plan d'eau et je vais finir l'après-midi toute seule à la plage.

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En musique :
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Dessins :
  1. Noirmoutier
  2. Noirmoutier
  3. Noirmoutier
  4. Noirmoutier
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mardi 7 mars 2017

DEUXCENTSOIXANTESIX

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Les dessins dans la boîte aux lettres aujourd'hui :

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N'ayant jamais considéré la photographie comme une activité artistique, la seule raison qui justifiait ma participation à ce vernissage était l'amitié qui me liait à Séraphine. Séraphine suivait le même cursus que l'artiste dont on exposait les « œuvres », mais à la différence de « l'artiste » Séraphine usait de pinceaux, de pigments et de matériaux ; de sujets, de points de vue et d'intégrité...
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- Quelle imposture ! Depuis quand la photographie devrait être un art ? C'est incompréhensible. Regarde ces croûtes ! Pas un point de vue, aucune éthique...
- Oui. Mais regarde le monde ! Elle a un succès dingue !
- Je me demande à quoi elle peut ressembler... Tu étais à ce point obligée d'être là ?
- À part les invités, elle est la seule personne à s'être déplacée pour mon vernissage... Même toi tu n'étais pas là.

Je n'étais pas au vernissage de Séraphine parce que Séraphine venait de me quitter. Depuis nous étions redevenus de simples et vrais amis, et c'était bien mieux que tout ce que nous avions essayé d'être auparavant. Et Séraphine se devait d'apparaître au vernissage de cette « collègue » honnie même pas fichue de faire une bonne photographie, sans parler d'art... Il n'y avait aucun lien entre les photographies que je finissais par ne même plus regarder et nous finîmes par croiser notre hôte ;  et Séraphine nous présenta.

Et je n'oublierai jamais ce moment...

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En musique :
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Dessins :
  1. Tournefeuille
  2. Nantes
  3. ?
  4. Noirmoutier
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samedi 4 mars 2017

DEUXCENTSOIXANTECINQ

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Les dessins dans la boîte aux lettres aujourd'hui :

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« Ce serait trop bien si on était des animaux ! Tu trouves pas ? Imagine par exemple, moi je voudrais être un koala ? C'est trop doux et trop mignon, ils grimpent dans les arbres, personne les embête, et en plus ils mangent que des feuilles de caliptusse. Je suis sûre que c'est génial d'être un koala. »

« Ou alors un kangourou ! Oui un kangourou, c'est génial c'est super mignon et ils sautent super loin et ils font de la boxe si on les chasse et ils ont des poches pour mettre toutes leurs affaires et leurs bébés tous doux. Tu voudrais pas qu'on soit des kangourous ? »

« Moi si je pouvais être un animal, je serais un lama. »
« Pourquoi ? C'est nul un lama ! C'est même pas mignon un lama ! »
« Peut-être que c'est pas mignon mais quand c'est pas content ça a le droit de cracher sur les autres...»

« Oui et sinon on pourrait être des oiseaux ? C'est super les oiseaux, ça vole et tout... »

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En musique :
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Dessins :
  1. Nantes
  2. Nantes
  3. Nantes
  4. Noirmoutier
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DEUXCENTSOIXANTEQUATRE

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Les dessins dans la boîte aux lettres aujourd'hui :

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Chacune de ses histoires commence de la même façon. Lui rencontrer elle, lui tomber amoureux - c'est la partie la plus simple. Ensuite, c'est la parade. Monsieur est présent. C'est sa méthode la présence. Un film ? On boit un verre ? Une expo ? On boit un verre ? Et un concert, ça te dirait un concert ? On boit un verre ? Un restaurant ? Un coup de main pour déplacer ce buffet ? Tu la veux comment ton étagère ? Et ma main ? Tu aimes comme ça ? Et ma langue, si je fais ça avec, ça va ? Il est tel un scout, toujours prêt...

Prêt à répondre au moindre de ses désirs à elle, qui qu'elle soit, pourvu qu'elle lui plaise. Certains ont besoin d'être aimable, lui son truc c'est d'être indispensable. D'accord pour tout faire, tout essayer. Qu'on n'aille pas s'imaginer qu'il pourrait être remplaçable, ou pire, remplacé. Avec cette technique relativement imparable, finalement c'est lui qui finit par remplacer. Forcément, à se rendre indispensable au premier regard, quand vient son tour de désirer quelque chose et que cette chose n'est pas partagée... Il se lasse donc régulièrement...

Sauf qu'avec cette demoiselle-ci, il est comme un poisson dans l'eau. Comprenez qu'il se rend indispensable comme à son habitude, mais que cela ne lui coûte absolument pas. Se rendre indispensable pour faire quelque chose qu'on a envie de faire ? Pour faire quelque chose qu'on aurait fait tout seul ? Qu'on allait faire tout seul ? Pensez-donc, mais avec plaisir ! Et voilà que c'est elle qui se lasse ! Elle, les princes charmants, elle connaît, elle a déjà donné même !

Elle sait bien qu'à la fin ça te laisse tomber...Alors pour cette fois, comme elle le voit venir, c'est elle qui s'en va. Et lui de redevenir un crapaud.

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En musique :
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Dessins :
  1. Nantes
  2. Nantes
  3. ?
  4. Fontevreau
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DEUXCENTSOIXANTETROIS

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Les dessins dans la boîte aux lettres aujourd'hui :

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Au début, c'est une simple rumeur qui parcourt la ville. Puis c'est l'alerte : « nous sommes assiégés ! » Les hommes partent au combat. Les défenses s'organisent. Mais bientôt les nouvelles sont graves. Les hommes tombent les uns après les autres quand l'ennemi est toujours plus fort en nombre, en volonté, puis en ignominie... Les survivants songent à un plan de retraite mais comment fuit-on une ville assiégée ?

« Nous avons des véhicules et l'ennemi n'en a pas ! Voilà notre salut ! » Voitures, fourgonnettes, vélos, scooters, bus et tramways sont réquisitionnés, rassemblés, et les fuyards sont enregistrés pour dresser des listes de prioritaires. Les femmes et les enfants d'abord comme on dit dans la marine...

Pendant ce temps, aux portes de la ville, l'ennemi imagine un plan pour empêcher cette grande évasion. On aiguise ses armes, on prépare des tranchées, on...

« Des lapins ? Vraiment ? »

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En musique :
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Dessins :
  1. Munich
  2. Munich
  3. Munich
  4. Nantes
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DEUXCENTSOIXANTEDEUX

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Les dessins dans la boîte aux lettres aujourd'hui :

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Alors évidemment, il y a des choses que je ne peux plus faire, mais je ne vais pas m'en plaindre. Par exemple, travailler ne me manque pas plus que ça. Surtout que mon travail n'était pas de tout repos, en mer quatre semaines sur cinq, pas le temps de voir les enfants grandir et à peine à terre, pas le temps de se reposer, il fallait s'occuper d'eux à temps plein, comme si je savais m'occuper d'eux comme il faut... De toutes façons ils ne pouvaient pas me supporter.

Ils me préfèrent largement depuis que j'ai changé. Bien sûr, ce n'est pas moi qui m'occupe d'eux, ce serait même plutôt l'inverse, mais pour tout dire, j'adore ça et je vois bien qu'eux aussi adorent ça. Enfin, je reconnais qu'à leur âge, ils ne maîtrisent pas bien ce qui s'est passé. Et je ne suis pas certain que leur mère ait pris le temps de le leur expliquer. C'est pas forcément évident à comprendre aussi.

Elle-même, ma femme, a eu du mal au début à bien comprendre ce qui m'était arrivé. Et je n'étais pas dans une position facile pour le lui expliquer clairement. Il faut reconnaître que la perte de la parole est un véritable handicap. Si on y ajoute la perte des mains, les possibilités de communication sont encore amoindries. Heureusement que j'avais d'autres moyens de me faire reconnaître.

Finalement, vu d'ici, et pour ce qui me concerne, tout va pour le mieux.

Souvenez-vous... DIXNEUF

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En musique :
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Dessins :
  1. Nantes
  2. Nantes
  3. Nantes
  4. Nantes
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