dimanche 31 octobre 2010

CENTQUARANTECINQ


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Il en vient de partout, chaque jour un peu plus nombreux, chaque jour un peu plus près.
Ils sont là, autour, se pressent, marchent derrière moi, se rapprochent toujours, touchent tout ce qui m'entoure, s'assoient sur les sièges ou je m'assois, boivent dans les verres où je bois.
Je sais qu'ils me suivent, ils me regardent. Pourquoi me regarder si ce n'est pour me suivre. J'en sème un, deux nouveaux surviennent que je sème à leur tour mais un quatrième surgit...
Je change de tenue, je brouille les pistes. Parfois l'un d'eux se rapproche de moi, d'un peu trop près, d'assez près pour me toucher, me sentir. Il me reconnait, je le sens, je le sais. Alors je suis obligée de l'éliminer.

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Musique :
  • Tindersticks - People keep Comin' Around
Dessins :
  1. Toulouse
  2. Toulouse
  3. Toulouse
  4. Toulouse

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vendredi 29 octobre 2010

CENTQUARANTEQUATRE


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Ils sont partis depuis quelques semaines maintenant. On suit leur parcours grâce à leurs amis qui sont restés. Nous, ils n'osent pas nous appeler. On aura peut-être une carte quand ils seront arrivés au terme de leur voyage. Peut-être que les parents des autres ont reçu des nouvelles par le courrier, il faudrait que je le leur demande...
Depuis qu'ils sont partis je pense sans cesse à tous les voyages que j'ai rêvé de faire. Sans cesse, c'est chaque instant que le quotidien me laisse sans rien à penser que ce qui me plaît. Et depuis qu'ils sont partis je ne pense qu'à ça, aux voyages. Aux endroits connus et plus encore aux endroits inconnus que j'aurais pu découvrir. Idem avec les personnes, je pense d'abord à ceux que j'aurais pu rencontrer plutôt qu'à ceux que je connais.
Je sais que les amies de la bande sont restées au bercail. Ils ont voulu faire ça entre hommes. C'est exactement ce que j'aurais voulu faire et je les jalouse encore plus que je ne m'inquiète de leur sort. Toute cette route, tous ces endroits, toutes ces rencontres, entourés de leurs meilleurs amis... 
Je m'imagine à leur place ; je nous imagine les gars et moi ; impossible de faire autrement...

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Musique :

  • Peter Von Poehl - Going Where The Tea Trees Are
Dessins :
  1. Tournefeuille
  2. Toulouse
  3. Toulouse
  4. Toulouse

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mercredi 27 octobre 2010

CENTQUARANTETROIS


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Ce matin, le soleil est revenu frapper à ma fenêtre.
Il n'est pas resté longtemps. A cette époque de l'année, il tourne bas et vite, mais j'étais content de l'avoir retrouvé ; ça  m'a donné envie de plus. Comme si je ne m'étais rendu compte de son absence qu'en le redécouvrant à ma fenêtre. 
J'ai mis toutes mes affaires dans des cartons, j'ai appelé un garde-meuble, et puis l'aéroport.
Je vais partir passer l'hiver en Californie, au soleil.

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Musique :

  • Perry Blake - California
Dessins :
  1. Toulouse
  2. Toulouse
  3. Toulouse
  4. Toulouse

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lundi 25 octobre 2010

CENTQUARANTEDEUX


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-"Et vous vous êtes rencontrés comment avec Papa ?"
-"A la laverie automatique. J'avais l'habitude d'aller à la laverie automatique à côté de l'appartement que je partageais avec ma soeur et ce jour-là elle était fermée. Je suis allée dans une autre, deux rues plus loin, ton père était là. Lui il venait toujours dans celle-là qui était plus près de chez lui. Les semaines suivantes je suis retournée dans cette laverie automatique dans l'espoir de le revoir et lui faisait pareil, il y venait tous les jours, matin et soir, il venait avec le linge de ses voisins..."
-"Et après?"
-"Il m'a emmenée chez lui, m'a présenté son chat, ses voisins, ses amis. On a commencé à sortir, au cinéma, au théâtre. On parlait, des heures et des heures. On ne s'était toujours pas embrassé...
... Puis un soir je suis restée chez lui. On discutait, comme à chaque fois qu'on était ensemble. Il me passait des disques, je disais ce que j'aimais sans trop mentir mais en mentant quand même. Ton père écoutait beaucoup de choses bizarres pour moi à l'époque. Il était tard, il m'a proposé de rester dormir. Il m'a laissé son lit et il a pris le canapé et je l'ai rejoint pendant la nuit.
-"Et t'avais quel âge quand t'as eu ton premier vélo?"

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Musique :

  • The Feelies - Original Love
Dessins :
  1. Toulouse
  2. Toulouse
  3. Toulouse
  4. Toulouse

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samedi 23 octobre 2010

CENTQUARANTEETUN


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Dès qu'il croise un ami, il n'a qu'elle à la bouche. Elle est toujours avec lui, l'accompagne en pensée. Il ne parvient pas à se débarrasser de son image.
Elle ? Si elle pense à lui elle n'en montre rien.
Il finit par se confier à de plus hautes instances. Non pas par croyance mais, parfois, un peu de hauteur et la situation prend un sens nouveau, une nouvelle ouverture peut se révéler.
En l'occurrence, l'ouverture est vers le bas, tout en bas, tout tout tout en bas... Une chute vertigineuse.

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Musique :
  • Depeche Mode - I Feel you
Dessins :
  1. Toulouse
  2. Toulouse
  3. Toulouse
  4. Toulouse

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jeudi 21 octobre 2010

CENTQUARANTE


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Lee habitait une petite maison aux abords de la ville. Ce jour là il avait eu une sale journée. Il avait bu le midi et dans l'après-midi une altercation avec son patron s'était soldée par son renvoi. Chez lui il est tombé sur Charlene et il l'a frappée. Elle s'est réfugiée au bar du centre et est tombée sur Lyons qui s'est occupé d'elle. 
Il l'a amenée dans sa chambre au-dessus, une chambre qu'il louait à l'année au patron du bar. Il a pansé les plaies de Charlene, s'est occupé d'elle, l'a déshabillée, l'a lavée, lui a donné la chaleur humaine dont elle avait besoin à ce moment-là. C'est ce que Charlene raconte.
Lee les a trouvés alors que le soleil venait de se coucher. Il a tué Lyons de trois coups de revolver dans la poitrine, tirés à bout portant. Il est resté sur le pas de la porte de la chambre, a visé Charlene mais est reparti sans tirer. Il s'est rendu au poste de police juste après l'incident. 
L'article paru dans la presse le lendemain occupait une dizaine de lignes en page 6.

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Musique :
  • Nick Cave And The Bad Seeds - Stagger Lee
Dessins :
  1. Nantes
  2. Nantes
  3. Toulouse
  4. Toulouse

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mardi 19 octobre 2010

CENTTRENTENEUF


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Comme cela s'était déjà produit, cela se reproduisit. Cette fois l'idée lui vrilla la tête un soir de septembre alors qu'elle discutait avec un inconnu rencontré au détour d'un site internet. Elle regarda autour d'elle et décida, sur le champ, qu'elle avait beaucoup trop de choses, qu'elle n'avait pas besoin d'un si grand appartement et qu'elle n'aimait plus le pays où elle vivait. Dans la nuit elle mit en vente la quasi totalité de ce qu'elle possédait, rédigea les courriers nécessaires pour résilier tous ses abonnements et rendre son logement puis acheta un billet d'avion pour la destination la plus lointaine accessible depuis l'aéroport le plus proche. Peu après, elle s'endormit d'un profond sommeil, libérateur.
Il fallut à peine trois jours pour liquider la totalité de ce qu'elle possédait. Elle partit avec un sac à dos, quelques vêtements légers — elle partait vers le sud — une brosse à dents et une brosse à cheveux. Elle lirait la littérature locale, écouterait la musique locale, mangerait local, vivrait local. A quoi bon s'encombrer alors ? Elle accueillit l'impersonnalité latente de l'aéroport comme une bouffée d'air frais, un espace à remplir de tout ce qu'elle avait en dedans, de tout ce qu'elle pouvait attendre du futur.
Arrivée sur place, elle trouva rapidement à son goût les modes et coutumes locales et trouva un endroit simple, spacieux, agréable à vivre et pas trop cher pour s'y installer à demeure jusqu'à nouvelle lubie. Elle s'habitua très vite au rythme de vie de ce pays chaud et haut en couleurs. Elle se fit quelques amis, souvent expatriés comme elle mais aussi quelques autochtones. Elle s'adapta à la langue parlée et en quelques semaines elle en maîtrisa les principales règles de base. Encore quelques mois et elle pourrait s'attaquer à la littérature du pays.
Elle se mit alors à dresser la liste de tout ce qui lui manquait pour parfaire son installation. Réfrigérateur, four, table et chaises, lit et draps, vêtements à la mode, chaîne hi-fi, téléviseur et lecteur dvd, téléphone, ordinateur, connexion internet...

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Musique :
  • Talking Heads - Once In A Lifetime (live from Stop Making Sense)
Dessins :
  1. Nantes
  2. Nantes
  3. Nantes
  4. Nantes

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dimanche 17 octobre 2010

CENTTRENTEHUIT


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Passer la journée à attendre près du téléphone ? Laisser le répondeur filtrer les appels. 
Sortir plutôt. Un tour au parc, un autre tour au parc, un tour autour des tours.
Croiser la vieille du 5bis, le fils de la boulangère.
Rentrer écouter les messages. Essayer de dormir.

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Musique :
  • Patti Smith - When Doves Cry (Prince Cover)
Dessins :
  1. Angers
  2. Angers
  3. Nantes
  4. Nantes


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vendredi 15 octobre 2010

CENTTRENTESEPT


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Alors que leur vie à deux a été un enchantement de chaque instant, il s'est produit, tout récemment, un évènement inattendu et brutal qui la pousse à reconsidérer tout leur passé commun. Ce genre de révolution ne peut s'accomplir seule... Donc, elle sort, à la recherche d'alliées potentielles qu'elle compte recruter parmi ses plus fidèles amies.
Leurs réactions sont unanimes et bien souvent silencieuses. Les expressions sur leurs visages trahissent leurs stupéfactions. "Soit il renonce à elles soit tu le quittes !" Telle est la sentence ; à l'unanimité.
Le quitter ? Oui. Il faut bien l'avouer. Le bouleversement est tel qu'elle a considéré cette éventualité avant même d'aller quérir conseil auprès de ses fidèles. Qu'il renonce à elles ? Le pourrait-il ? Le pourra-t-il ?
Lui, de son côté, fort de sa connaissance de la nature humaine de sa compagne, a bien compris le choc que cette nouvelle avait causé. Depuis qu'elle est partie, il se regarde dans la grande glace de l'entrée. Il pèse le pour, le contre. Il fait des essais. Il pèse le pour, le contre. Mais elles sont super belles ces santiags. Et je ne crois pas qu'il ait envie de les rendre...

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Musique :
  • The Chills - I Love My Leather Jacket

Dessins :
  1. Nantes
  2. Nantes
  3. Nantes
  4. Nantes

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mercredi 13 octobre 2010

CENTTRENTESIX


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J'ai rencontré ton Grand-Père le soir de mon vingt-deuxième anniversaire. J'étais en vacances avec mes parents en Normandie. Je travaillais, j'étais une des secrétaires du directeur des studios de Boulogne. Mais comme j'étais sans mari ni prétendant, les vacances je les passais avec mes parents. Ils avaient une petite maison à Cabourg, la même maison où j'ai passé toutes mes vacances. Ensuite c'est mon frère qui l'a gardée. Je passais mes journées sur la plage, je lisais, je me baignais. Le soir, on jouait au bridge avec mon frère et mes parents. Parfois, on allait marcher un peu le long de la plage.  
C'est un soir comme ceux-là que je l'ai rencontré. La nuit était tombée, une nuit d'août, il faisait encore chaud. Je me souviens très bien de ce que je portais ce soir là, une jupe à rayures bleues et jaunes, ample, qui descendait comme il faut, au milieu des mollets. La brise la faisait voler et je me rappelle encore du contact du tissu sur mes cuisses nues. En haut, j'avais un chemisier blanc, sans manche, que j'avais noué à la taille pour faire comme les actrices américaines qu'on voyait dans les magazines de cinéma. Il se tenait sur le bord de la jetée, appuyé contre un réverbère. La lumière du lampadaire tombait à côté de lui si bien qu'il était dans l'ombre et que j'étais en pleine lumière. J'ai été seule juste quelques secondes, mes parents étaient quelques mètres derrière moi, avec mon frère.
Il m'a fixée pendant que je passais dans la lumière. J'ai baissé les yeux mais j'ai senti longtemps son regard sur moi, sur toutes les parties de moi. Je crois que c'est ça qui m'a le plus électrisé, ça et son odeur. Il semblait grand, plus grand que moi en tout cas, mais avec l'ombre qui tombait sur lui je ne pouvais pas distinguer ses traits. Son odeur par contre m'a enveloppée comme un brouillard épais, un parfum fort, boisé, très viril. Il nous a suivis pendant un moment, j'entendais ses pas loin derrière ceux de me parents et de mon frère. J'ai jeté une dernière fois un regard dans la rue avant de refermer la porte, quand on est arrivé. Il était là, contre un autre réverbère, de l'autre côté de la route. 
On s'est connu une semaine durant. J'avais déjà connu des hommes avant lui mais de lui j'ai connu le plaisir et j'ai appris que connaissant cela, je pourrais être heureuse, même en vivant seule. Mais je ne suis pas restée seule longtemps puisque ton père est né neuf mois plus tard. Et c'est malheureusement tout ce que j'ai jamais pu lui raconter sur son père. Ça et son nom. 

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Musique :
  • Chet Baker - My Funny Valentine

Dessins :
  1. Corse
  2. Portigliolo
  3. Nantes
  4. Nantes

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lundi 11 octobre 2010

CENTTRENTECINQ


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Il les guettait depuis la frontière. Dès l'instant où il les a vues, elles sont devenues inoubliables. Il les a suivies de loin pendant une centaine de kilomètres, s'arrêtant parfois à leur hauteur à certains croisements, jouant à les perdre, les dépasser, bifurquant à un endroit et les retrouvant plus loin, par hasard...  Il est entré en contact à la faveur d'un arrêt dans une station essence qui donnait l'impression d'être fermée. Elle donnait même l'impression d'être fermée depuis de longues années. Le vieil homme qui est sorti pour faire le plein semblait fermé depuis longtemps lui aussi.
Et il devait être le dernier homme sur terre à pouvoir manipuler la vieille pompe rouillée qui devait déverser de l'essence raffinée en 1963. Les deux jeunes filles l'aguichaient salement le pauvre vieux. Lui, ça l'a fait rire et il a profité de la bonne humeur qu'elles dégageaient pour entrer en contact. La plus jeune des deux s'est aussitôt mise en retrait et ça a confirmé ce qu'il pensait. Ça sentait la pisseuse qui suit la vieille copine qui, pour quelque raison que ce soit, s'est enfuie de chez, au choix : ses parents, son mec, voire son mac pour ce qu'il en savait. Rayez les mentions inutiles. Qui que ce soit, il n'était pas près de la revoir. De les revoir...
Il les a invitées à le suivre, si elles voulaient s'amuser, se restaurer, se baigner, bref, se poser une après-midi, à l'écart, à l'ombre, loin du monde, tout ça. Il connaissait un coin tranquille où tout ça, et plus si affinité, était possible. Ni une ni deux qu'elles ont marché les petites salopes. Il les a entraînées dans son coin favori, là où il avait déjà entraînées quelques inoubliables avant elles. Il a pris la jeune avec lui dans sa voiture et la vieille les suivait. Il a même hésité un temps à la semer pour profiter un peu mieux de la jeune qui frimait un peu trop pour lui mais finalement il a gardé les deux. 
Les semaines qui ont suivi, il a passé la majeure partie de son temps libre à participer, bénévolement, aux recherches lancées dans la région, des deux côtés de la frontière. On recherchait un véhicule transportant deux jeunes filles parties de chez elles depuis deux semaines. Deux cousines qui avaient entamé un tour d'Europe en voiture pour fêter leur baccalauréat.

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Musique :
  • At The Drive-In - One-Armed Scissor

Dessins :
  1. Corse
  2. Portigliolo
  3. Corse
  4. Corse

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samedi 9 octobre 2010

CENTTRENTEQUATRE


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On suivait la piste depuis quinze jours. Hier on avait quitté le continent, par bateau. La nuit, sur l'eau, avait été féerique. Moi j'ai accueilli ça comme une pause et j'ai profité mais j'ai bien vu que le chef il avait la tête ailleurs. Il arrêtait pas de me dire d'aller dormir mais j'ai passé la nuit sur le pont avec la musique dans les oreilles. En arrivant le matin c'est lui qui pionçait dans la voiture. J'ai pris le volant et repris la piste comme on l'avait discuté la veille, plein sud par la côte ouest. Très vite, je suis tombé sur leur voiture, abandonnée sur le bord de la route.
On a commencé à rayonner autour du véhicule avec le patron. L'idée c'était de trouver la suite de la piste, un vêtement, des restes de cigarettes, de nourriture, des traces de passages dans les broussailles du maquis, n'importe quoi. Et on a fini par trouver, une piste qui menait à une plage encombrée de paillotes et d'où partait un vieux bateau de pêche. Il a fallu réfléchir et agir vite. Le chef est reparti à notre voiture pour poursuivre la route par la côte, j'ai emprunté un canot à moteur à un type sur la plage pour suivre la piste par la mer. 
J'ai retrouvé le chef tard dans la nuit. J'ai pisté le vieux bateau pendant près d'une dizaine d'heures jusqu'à une crique. Le bateau a mouillé là. Il y a eu quelques échanges de lumières avec la côte et un canot les a rejoints. Je suis resté en embuscade encore deux heures et comme rien ne bougeait, je suis parti retrouver le chef au point de rendez vous, un camping sur la côte à une heure, par la mer, en arrière. Une fois que je l'ai retrouvé, on est revenu par la route à la crique où mouillait le rafiot. Bien sûr, il avait disparu.
On a fini par se trouver une chambre dans une vieille auberge dans un petit village un peu plus bas sur la côte. Le lendemain, aux infos de la radio locale, ils parlaient d'un vieux bateau de pêche englouti par les flots dans la tempête qui avait balayé la nuit. Au travers des vieux rideaux en dentelle qui pendaient aux fenêtres, le bleu du ciel disputait l'horizon au soleil du matin. 

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Musique :
  • The B-52's - Dance This Mess Around

Dessins :
  1. Portigliolo
  2. Portigliolo
  3. Corse
  4. Corse

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jeudi 7 octobre 2010

CENTTRENTETROIS


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Madame, Monsieur,
     Comme votre offre "satisfait ou remboursé" le propose, je me permets de vous renvoyer votre lot de promotion "perdez dix kilos en dix jours sans effort" accompagné de la preuve d'achat. En effet, après l'avoir utilisé pendant trois jours je peux d'ores et déjà vous dire que je ne suis pas du tout satisfaite. 
     Tout d'abord, j'ai perdu totalement, et ce dès la première gélule ingérée, l'appétit. Il m'est impossible d'ravaler quoi que ce soit d'autre que vos pilules depuis que j'ai commencé la cure. Si c'est là la façon dont vous entendez faire perdre leur poids à vos clients, laissez-moi-vous dire que c'est criminel. 
     Ensuite, j'ai des hallucinations. Depuis deux jours, je commence à avoir des troubles de la vue que j'associais d'abord au jeune forcé par vos pilules mais ces troubles se sont rapidement corsés. Depuis hier, j'en suis à voir ma défunte mère discuter avec mon pépé mort pendant la grande guerre et dont la photo encadrée sur le buffet du salon hantait mes cauchemars de petite fille. 
     Enfin, depuis que je suis votre traitement, je suis devenue complètement aboulique. L'idée de me lever me fait simplement horreur. Je ne fais plus rien, je ne me lave même plus. 
     Je me vois donc dans l'obligation de renoncer à votre cure express et de vous retourner le restant de ce lot DGT33526SB4748 dont j'attends le remboursement avec confiance.
     D'avance je vous remercie et vous prie de croire en l'assurance se mes sentiments les meilleurs.

G.Chenu. 

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Musique :
  • Saint Etienne - Shower Scene 

Dessins :
  1. Nantes
  2. Corse
  3. Corse
  4. Corse

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