lundi 31 janvier 2011

CENTSOIXANTEQUINZE


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Sur la plage de Malibu en Californie du Sud, sous un soleil d'été californien, une jeune fille aux cheveux blonds et à la silhouette californienne également se baignait. Il était encore tôt le matin et elle avait laissé là ses affaires, une paire de sandales et une serviette éponge épaisse plutôt destinée à une salle de bain qu'à une plage de sable fin. Un jeune homme tentait, malgré une silhouette enveloppée et une course à la foulée désordonnée, de se donner un air local. Ses baskets aux semelles d'argent brillaient au soleil et les clés de sa voiture tintaient dans sa poche. A la vue de la paire de sandales posées près de la serviette il s'arrêta et, les mains sur les genoux, le dos un peu plié, la respiration redevenant régulière, il chercha dans les vagues la propriétaire des dits objets.
C'est le soleil qui révéla la jeune fille lorsqu'elle sortait de l'eau en marchant lentement vers la plage, faisant briller l'eau qui ruisselait sur son corps. Comme elle s'approchait, il parvenait à distinguer plus clairement ses contours, les traits de son visage, la blondeur de ses cheveux collés dans son cou, un bracelet qui pendait au poignet. Parvenue à sa portée elle lui fit un sourire et lui, maintenant dressé sur ses jambes droites, bombant le torse et tentant de rentrer le ventre, entreprit de lui proposer un café comme on achète sa baguette. Contre toute attente elle accepta et l'invita même chez elle, à deux pas d'ici, sur sa terrasse donnant sur la plage.
Elle mit un disque, apporta un plateau encombré d'une cafetière, de deux tasses, d'un sucrier et d'une grande corbeille remplie de fruits frais : cerises, fraises, mangues, kiwis, oranges. Il aurait bien fait la conversation mais pour une fois, à la vue de tout ce qui s'offrait à lui, les mots lui manquaient. Cela ne semblait pas la gêner outre mesure et c'est elle qui commença à l'entreprendre. Lui n'en revenait simplement pas. Ses conquêtes s'étaient la plupart du temps soldées par des échecs cuisants qui alimentaient en moqueries diverses les conversations de ses amis, qu'il soit présent ou non d'ailleurs. Il rêvait intérieurement qu'ils se trouvaient tous là aujourd'hui pour contempler enfin son succès.
Ils étaient maintenant dans sa chambre. Elle roulait sur lui, experte, et lui pensait très fort au bureau, à son patron, à n'importe quoi qui pourrait le faire tenir tranquille encore un peu, juste un peu. Puis finalement, le mari de la jeune femme pénétra dans la pièce, nu et droit comme un i. Sans un mot, lui se leva, d'un bond, et quitta la chambre, la maison, la plage, au pas de course et dans le plus simple appareil. Ses clés tintaient dans sa main au rythme nerveux de sa course devenue régulière et il pensait intérieurement "pourvu que personne ne l'apprenne"...

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B.O.S.T. :

Dessins :
  1. Angers
  2. Angers
  3. Angers
  4. Toulouse

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samedi 29 janvier 2011

CENTSOIXANTEQUATORZE


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Cela fait des années que Thomas vit sur des chantiers à bâtir des immeubles.
Des années qu'il vit dans des tentes de fortune entouré de Thomas comme lui qui bâtissent des immeubles pour les autres.
Des années que Thomas et ses compagnons dorment dans des lits à l'allure et au confort militaires sous des toits de toiles dans des sacs de couchage trop chauds l'été et trop humides l'hiver.
et bien vous ne serez pas surpris d'apprendre que Thomas en a ras le bol...

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B.O.S.T. :
Dessins :
  1. Blagnac
  2. Blagnac
  3. Blagnac
  4. Toulouse

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jeudi 27 janvier 2011

CENTSOIXANTETREIZE


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J'étais surpris, un jour que je faisais le bureau buissonnier, prétextant une gastro-entérite fulgurante — Je m'esclaffe chaque jour que les informations traitent d'épidémie de gastro-entérites — j'avais décidé de passer la journée dehors, de marcher dans ma ville, imaginant pouvoir y déambuler tranquille puisque tout le monde, sauf moi, était censé se trouver à son travail. J'étais surpris, disai-je avant de grossièrement m'interrompre, de trouver dans ma ville autant de gens qui n'étaient pas censés, donc, s'y trouver à ce moment-là.
Pour moi, les rues de la ville en pleine journée de pleine semaine doivent ressembler à une rue de ville au mois d'août, à une plage en hiver, à la montagne en été. Enfin, vous me suivez. Non ? Et bien lors de ce fameux jour, le premier d'une longue et délicieuse série, je découvrais à la fois surpris et agacé, que je n'étais pas le seul à m'aventurer hors des sentiers balisés de la présence en entreprise. Car pour qu'autant de quidams encombrent ainsi mon passage en pleine semaine, il fallait bien qu'il s'en trouve de nombreux comme moi à échapper illégalement à l'emprise patronale — même si c'était pour mieux retomber sous son joug le lendemain venu.
Du coup, je laissais la surprise l'emporter sur l'agacement et me prenais à imaginer les raisons que tous ces gens avaient bien pu donner pour ne pas se rendre à leur travail. Oui, ma naïveté d'alors me poussait à croire que tout le monde avait le même travail ennuyeux que moi. Maintenant je sais que le travail peut être encore plus ennuyeux et qu'il peut être encore plus ennuyeux de ne pas en avoir. On grandit tous les jours. Je les regardais, tous ces gens, attendre. Attendre le long des trottoirs, des terrasses de cafés, des entrées de cinéma. Tout le monde attend quelque chose. C'est pour ça que je préfère marcher, même sans but. La sensation d'attente se laisse dompter par celle de s'y rendre.
En l'occurrence, si je marchais en dehors des sentiers battus ce jour-là, c'est parce que quelque part, quelqu'un m'attendait.

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B.O.S.T. :

Dessins :
  1. Toulouse
  2. Saint-Pierre des Corps
  3. Toulouse
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mardi 25 janvier 2011

CENTSOIXANTEDOUZE


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- "Le groupe Queen enregistre la chanson Bicycle Race en 1978. Elle figure en face B du simple Fat Bottomed Girls et les deux titres se hisseront chacun leur tour au sommet des hit-parades."
- "Le groupe organisa une course cycliste le dix-sept septembre mille neuf cent soixante dix-huit qui réunit soixante cinq femmes nues sur des bicyclettes de location afin d'en tirer les images d'un clip vidéo et de la pochette du simple."  

- "Lorsque les bicyclettes furent retournées au loueur, celui-ci, ayant appris l'usage qui en avait été fait, refusa de les reprendre et demanda au groupe de lui rembourser les soixante cinq selles."
- "Tu te rends compte?"
- "J'aime pas Queen..." 

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B.O.S.T. :
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  3. Toulouse
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dimanche 23 janvier 2011

CENTSOIXANTEETONZE


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Julien c'était l'ami de trop. Il n'avait rien de mieux ni de pire que les autres, c'était juste celui de trop. Je crois que j'en étais arrivé à un moment où tous tes amis auraient pu être des amies, je n'en aurais pas ressenti plus de dégoût. Je le revois là, entre nous, à cette place qu'ont toujours occupée tes amis et cette fois je ne te voyais même plus derrière lui. Tu avais disparu, comme avalé par un vortex. Tes amis sont ton vortex, ta matrice. Tu y es retourné. Pour moi tu n'existes plus en dehors d'eux. Et je ne peux plus les voir. JE ne veux plus te voir.
Je sais que ce sera dur. Je sais que je vais devoir m'occuper de moi. Mais tu seras le premier à penser que c'est pour mon bien — si toutefois tu te soucies encore de mon bien, si tu t'en es jamais soucié. Mais je suis heureuse, simplement heureuse, à l'idée de redécouvrir toutes ces choses que tu m'interdisais de faire juste parce que tu pensais les faire mieux que moi. Je suis impatiente de tout, comme je suis impatiente de faire du vélo parce que tu ne me conduis plus. 
Je te laisse tout, je n'ai besoin de rien.
Je n'ai besoin que d'amies... D'amies et plus si affinité.

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B.O.S.T.:
Dessins :
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vendredi 21 janvier 2011

CENTSOIXANTEDIX - HORS SERIE #17


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Passé la nuit dehors, rentré tard, ou tôt, c'est selon. Joué toute la nuit aux cartes, tout perdu.
Elle était partie quand il est rentré, sûrement inquiète, sûrement furieuse. Même pas eu le temps de le savoir, juste imaginer. Elle doit faire les boutiques telle qu'on la connaît, dépenser l'argent qu'il a perdu, l'argent qu'il doit à d'autres.
Pas beaucoup de solutions. Meurtres, mensonges...
La fenêtre sinon...

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B.O.S.T. :
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  1. Tunis
  2. Tunis
  3. Tunis
  4. Tunis

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mercredi 19 janvier 2011

CENTSOIXANTENEUF- HORS SERIE #16


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Ce matin, alors que le soleil est déjà haut au-dessus des toits, la ville est encore endormie.
Les petites rues qui la veille encore abritaient de petits groupes embusqués à l'affût des troupes aux ordres de la répression retrouvent dans la chaleur de midi l'ombre calme et reposante. 
Pendant ce temps à Vera Cruz... Ou ailleurs... La petite ville qui retrouve son calme fait des émules
Et du peuple qu'on croyait moribond revient l'envie d'en découdre.

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B.O.S.T. :
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lundi 17 janvier 2011

CENTSOIXANTEHUIT - HORS SERIE #15


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En Amérique, on aura de quoi manger. Tu n'auras plus besoin de courir dans la jungle à t'en écorcher les pieds. On chantera Jésus toute la journée en buvant du vin. 
C'est génial d'être américain...
Pas de lions, pas de tigres ; pas de serpents mamba. La simple douceur de la pastèque et du gâteau de sarrasin.
Tout le monde est aussi heureux qu'un homme peut l'être.
Embarque donc petit métèque, vient voguer avec moi...
En Amérique, chaque  homme est libre de s'occuper de sa maison et de sa famille.
Tu seras aussi heureux qu'un singe dans un arbre à singes. 
On va tous devenir des américains.
Embarquons, voguons. Embarquons, voguons. Nous allons traverser le vaste océan jusque dans la baie de Charleston.
Embarquons, voguons. Embarquons, voguons. Nous traverserons le vaste océan jusque dans la baie de Charleston.

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Tout à fait exceptionnellement, ce Strip Trip reprend l'intégralité des paroles, librement traduites, de la chanson "Sail Away", de Randy Newman, sans l'accord de l'auteur mais, nous l'espérons, avec sa bienveillante indulgence. 

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B.O.S.T. :
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  1. Tunis
  2. Tunis
  3. Tunis
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samedi 15 janvier 2011

CENTSOIXANTESEPT


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"Allez les gars ! Faut me faire pleurer le parterre, renifler les loges ! Que ces braves gens ne soient pas venus pour rien."
"Pensez au petit étudiant de la rue Ordener, celui qui livre des pizzas. Combien il en a livrées pour inviter la petite qui est en troisième année de licence, la grande brune avec des lunettes ?"
"Et le grand baraqué, le serveur du café du jour, celui qui double les doses quand le patron n'est pas là. Je suis sûr qu'il sera là aussi."
"Et tous les autres qui auraient pu être vous si vous n'aviez pas su tenir un archet." 

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B.O.S.T. :
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    jeudi 13 janvier 2011

    CENTSOIXANTESIX


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    Je passe dans les bureaux deux fois par jour : le matin, en arrivant, et le midi, quand je repars. Je ne surveille personne, je dois simplement traverser l'ensemble des bureaux pour parvenir au mien. Donc je fais tout pour être là très tôt et pour repartir juste un peu après que l'heure du déjeuner a sonné, pour ne croiser personne.
    Hier matin, j'ai croisé Jean-Michel de la compta. Jean-Michel de la compta tout le monde le connait, même moi qui fais en sorte de ne croiser personne j'ai entendu parler de Jean-Michel de la compta. Je pense que je connaissais Jean-Michel de la compta dans la boîte où je travaillais avant. Et dans toutes celles d'avant aussi. Quelque chose me dit qu'il y a des Jean-Michel de la compta dans toutes les compta du monde.
    Jean-Michel de la compta m'a parlé donc, au moment où je quittais le bureau, un midi donc. Il m'a suivie — du moins est-ce ce qu'il m'a dit en me rejoignant au local à vélo. Il m'a abordée au moment où je montais dessus. Quelques dixièmes de seconde supplémentaires et j'aurais été trop loin pour qu'il me rejoigne. J'enrage de les avoir ratés et me demande encore ce qui m'a pris si longtemps pour que je descende si tard.
    Mais je sais que Jean-Michel m'attendais, je ne pouvais rien faire pour lui échapper. Impossible d'y couper, je devais être présente le lendemain au soir pour boire un verre avec lui et tout le monde pour fêter son mariage. Parce que Jean-Michel de la compta va se marier. Vous y croyez vous ? Moi, pas une seconde. Y a pas un Jean-Michel de la compta qui puisse se marier.

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    mardi 11 janvier 2011

    CENTSOIXANTECINQ


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    C'est l'histoire d'un endroit qui cachait, dans les années 30, des armes et parfois des combattants, destinés au combat aux côtés des colonnes républicaines en Espagne. Une petite quincaillerie dans un petit village des Cévennes.
    Une famille vivait là, au-dessus. Ils ne sont pas partis en Espagne, elle attendait un nouvel enfant et élevait deux fillettes et lui avait charge d'âmes. Nulle question de partir quand tant de vies comptent sur vous. Mais lui les regardait avec envie ceux qui allaient se battre pour la liberté. Il se sentait bien petit de rester là, à l'abri. 
    Juste derrière il y avait l'église où ils se sont mariés, où ils ont baptisé leurs enfants, comme on leur avait appris à le faire. Le curé de la paroisse était de leur côté, il était allé en Espagne, lui. 
    Et là, dans leur grenier, ils ont caché de quoi, à leur mesure, lutter contre l'occupant. Bof, pas grand chose, un poste radio, de quoi ravitailler d'éventuels résistants qui se seraient manifestés. Mais ça comptait beaucoup. Puis finalement non.    

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    3. Toulouse
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    dimanche 9 janvier 2011

    CENTSOIXANTEQUATRE


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    Ma maman me disait : "quand on cherche, on trouve..."
    Mais depuis que je le leur ai pris, ils cherchent mais ne trouvent pas.
    Ils cherchent, ils cherchent...
    Et ils ne savent même pas ce que je leur ai pris.

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    B.O.S.T. :
    Dessins :
    1. Clermont Ferrand
    2. Clermont Ferrand
    3. Clermont Ferrand
    4. Angers

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    vendredi 7 janvier 2011

    CENTSOIXANTETROIS


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    Je me sentais vaseux en descendant de l'avion ; un mauvais rêve, pendant toute la durée du vol, s'était acharné sur moi. C'est le passager d'à côté qui m'a réveillé en m'enjambant pour rejoindre l'allée. Dans l'aéroport international j'ai mis plus longtemps qu'à l'accoutumée pour trouver mon chemin ; les voyageurs autour de moi paraissaient moins nombreux qu'ils n'auraient dû l'être.
    Comme prévu, un attaché de presse m'attendait, "voiture et chauffeur vous attendent". Heureusement, j'aurais été incapable de trouver la sortie, une file de taxi, une adresse où me déposer. La route fut silencieuse. L'attaché est descendu avec moi au palais des congrès. Le chauffeur déposerait ma valise à mon hôtel, viendrait me chercher et m'y emmènerait à mon tour sitôt que j'en exprimerai l'envie. Comme ils parlent les attachés de presse...
    Je lui ai demandé de me laisser seul un moment, je voulais remettre mes idées en place avant mon intervention, me regarder une fois dans la glace, boire un café, quelque chose de fort. La foule dans les couloirs et les galeries du palais était dense, les regards que je croisais, me reconnaissant, étaient curieux et pleins d'attentes.
    Quand ça a été mon tour, je suis entré dans la salle de conférence et suis monté sur l'estrade. Elle était là. J'étais paralysé...

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    B.O.S.T. :
    Dessins :
    1. Clermont Ferrand
    2. Clermont Ferrand
    3. Clermont Ferrand
    4. Clermont Ferrand

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